Les défis nutritionnels spécifiques aux personnes âgées en EHPAD
Quand vous accompagnez un parent en EHPAD, l’une de vos premières préoccupations concerne souvent son alimentation. Et vous avez raison ! L’alimentation seniors représente bien plus qu’un simple besoin physiologique – c’est un vecteur de plaisir, de santé et de lien social. Pourtant, les établissements font face à de nombreux défis pour proposer des repas à la fois adaptés aux besoins spécifiques des résidents, conformes aux normes sanitaires et suffisamment appétissants. Découvrons ensemble comment la restauration collective en EHPAD peut relever ces défis et transformer les moments de repas en véritables instants de vie.
Comment l’alimentation seniors évolue avec l’âge et les pathologies
Avec l’avancée en âge, vous remarquerez que les besoins et les capacités alimentaires de vos proches changent considérablement. Le vieillissement s’accompagne de modifications physiologiques qui impactent directement leur rapport à la nourriture. La diminution des capacités sensorielles est l’un des premiers changements observables : le goût et l’odorat s’atténuent progressivement, rendant les aliments moins savoureux.
Vous avez peut-être déjà constaté que votre parent ajoute plus de sel ou de sucre dans ses plats ? C’est une adaptation naturelle face à cette perte sensorielle. En EHPAD, cette problématique nécessite une attention particulière pour éviter que les résidents ne délaissent leur assiette, tout en veillant à ne pas surcharger les plats en sel, notamment pour ceux souffrant d’hypertension.
Les pathologies chroniques modifient également les besoins nutritionnels. Par exemple, le diabète impose un contrôle des apports en glucides, tandis que l’insuffisance rénale nécessite une surveillance des protéines et du potassium. Les troubles de la déglutition, fréquents après un AVC ou chez les personnes atteintes de maladies neurodégénératives, exigent des textures adaptées pour prévenir les fausses routes.
« L’alimentation doit s’adapter au patient, pas l’inverse. Chaque pathologie nécessite une approche nutritionnelle spécifique tout en préservant le plaisir de manger. » – Dr. Marion Leclerc, nutritionniste spécialisée en gériatrie
Les besoins nutritionnels particuliers après 75 ans
Contrairement aux idées reçues, les besoins énergétiques ne diminuent pas drastiquement avec l’âge. Si la dépense énergétique liée à l’activité physique baisse, le métabolisme de base reste relativement stable. Vous devez savoir que vos proches en EHPAD ont besoin d’un apport calorique adapté, généralement entre 1800 et 2000 kcal par jour selon leur niveau d’activité.
Les protéines deviennent particulièrement importantes après 75 ans. Leur apport recommandé augmente à 1g/kg/jour (contre 0,8g pour un adulte plus jeune) pour lutter contre la sarcopénie – cette perte progressive de masse musculaire qui fragilise et augmente les risques de chutes. Dans la pratique, cela signifie qu’un résident de 70kg devrait consommer environ 70g de protéines quotidiennement, réparties sur les différents repas.
Les micronutriments jouent également un rôle clé dans l’alimentation seniors. Le calcium et la vitamine D sont essentiels pour maintenir la densité osseuse et prévenir les fractures. La vitamine B12, dont l’absorption diminue avec l’âge, participe au bon fonctionnement neurologique. Les antioxydants (vitamines C, E, sélénium) contribuent à la protection cellulaire face au stress oxydatif accru chez les personnes âgées.
Un autre aspect souvent négligé concerne les fibres alimentaires. Elles favorisent un transit intestinal régulier, problématique fréquente en EHPAD. Un apport quotidien de 25 à 30g de fibres, associé à une hydratation suffisante, permet de réduire significativement les problèmes de constipation chronique.
La dénutrition et la déshydratation : deux risques majeurs à surveiller
La dénutrition touche environ 40% des résidents en EHPAD, un chiffre qui devrait vous alerter si vous avez un proche en institution. Ce phénomène résulte d’un déséquilibre entre les apports nutritionnels et les besoins de l’organisme. Vous pouvez le repérer par une perte de poids involontaire, une diminution de l’appétit ou une fatigue inhabituelle.
Les conséquences de la dénutrition vont bien au-delà de la simple perte de poids. Elle affaiblit le système immunitaire, ralentit la cicatrisation, augmente le risque d’escarres et accélère la perte d’autonomie. Un cercle vicieux s’installe : moins la personne mange, plus elle s’affaiblit, et moins elle a la force ou l’envie de s’alimenter.
La déshydratation représente l’autre danger majeur. Avec l’âge, la sensation de soif s’émousse, alors même que les besoins en eau restent constants. Vous avez peut-être remarqué que votre parent boit moins spontanément ? C’est un phénomène physiologique normal mais qui nécessite une vigilance accrue. Une déshydratation, même légère, peut entraîner confusion, fatigue, constipation et augmenter le risque de chutes.
Pour contrer ces risques, les établissements mettent en place des protocoles de surveillance nutritionnelle : pesée régulière, évaluation de l’appétit, adaptation des textures et enrichissement des plats. L’hydratation fait l’objet d’une attention particulière avec des tournées de boissons systématiques entre les repas.
Concilier contraintes collectives et plaisir dans l’alimentation seniors
Quand vous visitez votre proche en EHPAD, vous vous demandez peut-être comment ces établissements jonglent entre les contraintes sanitaires strictes et la nécessité de proposer des repas appétissants. C’est un équilibre délicat à trouver, mais certains établissements y parviennent avec brio, transformant ce qui pourrait n’être qu’une simple nécessité nutritionnelle en véritable moment de plaisir.
Les normes sanitaires et budgétaires qui encadrent la restauration en EHPAD
La restauration collective en EHPAD est soumise à un cadre réglementaire particulièrement strict. La méthode HACCP (Hazard Analysis Critical Control Point) constitue la colonne vertébrale de ces normes, imposant une traçabilité complète des aliments et des procédures rigoureuses pour prévenir les risques de contamination. Vous pouvez être rassuré : ces protocoles garantissent la sécurité alimentaire de votre proche.
Les contraintes budgétaires représentent un autre défi majeur. En 2025, le coût journalier moyen alloué à l’alimentation seniors en EHPAD oscille entre 4,50€ et 6€ par résident. Cette enveloppe doit couvrir les trois repas principaux et les collations, tout en assurant l’équilibre nutritionnel et la qualité gustative. Un véritable tour de force pour les équipes de restauration !
La gestion des approvisionnements s’avère également complexe. Les établissements doivent souvent composer avec des marchés publics ou des centrales d’achat qui limitent leur flexibilité. Pourtant, certains EHPAD innovent en développant des partenariats locaux qui permettent d’améliorer la qualité tout en maîtrisant les coûts.
Face à ces contraintes, les responsables de restauration développent des stratégies ingénieuses : menus cycliques optimisés, recettes revisitées avec des ingrédients de saison, techniques de cuisson préservant les qualités organoleptiques des aliments. L’objectif reste toujours le même : offrir le meilleur rapport qualité-plaisir-nutrition dans le respect du cadre imposé.
Adapter les textures sans sacrifier les saveurs : techniques et astuces
Vous avez peut-être déjà grimacé en voyant une assiette de purée uniforme servie à votre parent ? Les textures modifiées sont pourtant souvent nécessaires pour les résidents souffrant de troubles de la déglutition ou de mastication. La bonne nouvelle, c’est que les approches ont considérablement évolué ces dernières années.
Les établissements progressistes adoptent désormais une classification précise des textures, allant du « normal » au « mixé lisse », en passant par le « haché », le « mouliné » et le « mixé ». Cette gradation permet d’adapter finement l’alimentation aux capacités de chaque résident, sans basculer trop rapidement vers des textures totalement modifiées qui peuvent être déprimantes.
Les techniques culinaires modernes permettent de préserver les saveurs même dans les textures adaptées. L’utilisation de gélifiants naturels, la cuisson sous vide à basse température, les mousses aérées ou encore la restructuration des aliments mixés en forme reconnaissable transforment l’expérience gustative. Imaginez la différence entre une purée verte indistincte et des petits pois restructurés qui ressemblent à… des petits pois !
« La texture modifiée ne doit pas être synonyme de plat insipide. Avec les bonnes techniques, nous pouvons préserver 80% des saveurs originales tout en garantissant la sécurité des résidents. » – Chef Thomas Durand, formateur en cuisine adaptée pour seniors
L’assaisonnement joue également un rôle crucial. Face à la diminution des capacités sensorielles, les épices, herbes aromatiques et condiments deviennent des alliés précieux. Toutefois, il ne s’agit pas simplement d’augmenter les doses, mais plutôt de jouer sur la complémentarité des saveurs et les notes aromatiques qui stimulent l’odorat.
L’importance du dressage et de la présentation des plats
On mange d’abord avec les yeux ! Cette expression prend tout son sens en EHPAD, où la présentation des plats peut faire toute la différence dans la perception et l’appétence. Vous avez sûrement remarqué que votre appétit s’éveille davantage face à une assiette soignée et colorée, n’est-ce pas ? C’est exactement pareil pour les résidents.
Le contraste des couleurs stimule l’appétit et facilite l’identification des aliments, particulièrement important pour les personnes souffrant de troubles cognitifs. Une assiette monochrome de purées beiges décourage avant même la première bouchée, tandis qu’une composition aux teintes variées invite à la dégustation.
La disposition des éléments dans l’assiette mérite également attention. Les composantes du repas clairement séparées permettent au résident de distinguer les différents aliments et de choisir l’ordre dans lequel il souhaite les consommer. Cette autonomie préservée, même minime, contribue significativement au plaisir de manger.
Les contenants eux-mêmes influencent l’expérience du repas. Les assiettes à rebord facilitent la prise alimentaire pour les personnes ayant des difficultés de préhension. Les arts de la table soignés – nappes, serviettes en tissu, vaisselle élégante – transforment le cadre institutionnel en espace plus domestique et chaleureux.
Certains établissements vont plus loin en proposant des « assiettes gourmandes » pour les textures modifiées : les purées sont dressées à la poche à douille, les sauces ajoutées au dernier moment, les garnitures disposées avec soin. Ces attentions, qui ne prennent que quelques secondes supplémentaires, font toute la différence dans l’alimentation seniors.
Repenser l’organisation des repas pour en faire des moments de vie
Vous souvenez-vous des repas de famille où l’on passait des heures à table, à discuter et partager bien plus que de la nourriture ? Ces moments précieux ne devraient pas disparaître en EHPAD. Au contraire, les repas peuvent devenir des points d’ancrage essentiels dans la journée des résidents, des occasions de socialisation et de plaisir partagé.
L’aménagement des espaces de restauration : créer une ambiance conviviale
L’environnement dans lequel vous mangez influence considérablement votre expérience gustative. C’est encore plus vrai pour les personnes âgées en institution. Les EHPAD innovants transforment leurs salles à manger en véritables lieux de vie, loin des réfectoires impersonnels d’autrefois.
L’acoustique représente un élément fondamental souvent négligé. Une salle trop bruyante génère stress et confusion, particulièrement chez les résidents malentendants ou atteints de troubles cognitifs. Les matériaux absorbants, les séparations d’espace et la diffusion musicale adaptée créent une ambiance sonore apaisante qui favorise les échanges sans surcharge sensorielle.
L’éclairage joue également un rôle déterminant. Une lumière naturelle abondante régule naturellement les rythmes circadiens et stimule l’appétit. En soirée, un éclairage plus tamisé mais suffisant pour bien voir le contenu des assiettes contribue à une atmosphère plus intime et chaleureuse.
La disposition des tables mérite une réflexion approfondie. Les grandes tablées imposées cèdent progressivement la place à des configurations plus flexibles : petites tables de 4 à 6 personnes, possibilité de s’installer avec qui l’on souhaite, espaces semi-privatifs pour accueillir les familles. Cette organisation respecte les affinités naturelles et préserve la dimension sociale du repas.
Certains établissements vont plus loin en créant des espaces thématiques : coin bistrot, espace familial avec grande table, alcôves plus intimes. Cette diversité permet aux résidents de choisir leur environnement selon leur humeur ou leurs visiteurs, renforçant leur sentiment d’autonomie.
Le rôle essentiel du personnel accompagnant pendant les repas
Vous l’avez peut-être remarqué lors de vos visites : la qualité de l’accompagnement pendant les repas fait toute la différence dans l’expérience de votre proche. Le personnel ne se contente pas de servir les plats ; il joue un rôle fondamental d’accompagnement, de stimulation et parfois d’aide directe à l’alimentation.
La formation des équipes aux spécificités de l’alimentation seniors transforme l’approche du service. Connaître les techniques d’aide au repas sans infantiliser, savoir stimuler sans forcer, adapter son rythme à celui du résident… Ces compétences s’acquièrent et s’affinent avec la pratique et des formations dédiées.
La stabilité des équipes contribue également à la qualité de l’accompagnement. Quand le personnel connaît bien les habitudes, préférences et capacités de chaque résident, l’aide devient plus fluide et personnalisée. Cette connaissance fine permet d’anticiper les besoins sans attendre que la personne se trouve en difficulté.
« Un bon accompagnement au repas, c’est savoir quand intervenir et quand s’effacer. Notre objectif est de préserver au maximum l’autonomie tout en garantissant une alimentation suffisante. » – Sylvie Martin, aide-soignante référente nutrition
Le temps dédié aux repas constitue un facteur déterminant. Lorsque le personnel dispose de suffisamment de temps pour accompagner sans précipitation, l’ambiance devient plus détendue et les résidents mangent généralement mieux. Les établissements qui ont expérimenté l’allongement de la durée des repas rapportent une diminution des problèmes nutritionnels.
Impliquer les résidents dans les choix alimentaires et les menus
Avez-vous déjà ressenti cette frustration de ne pas pouvoir choisir ce que vous mangez ? Cette perte de contrôle sur un aspect aussi fondamental de la vie quotidienne peut être particulièrement difficile à vivre pour les résidents d’EHPAD. Heureusement, de nombreux établissements développent des approches participatives qui redonnent aux seniors leur pouvoir de décision.
Les commissions menus, intégrant des représentants des résidents, permettent d’exprimer préférences et suggestions directement aux équipes de restauration. Ces échanges réguliers créent un dialogue constructif et font évoluer l’offre alimentaire en fonction des retours. Vous seriez surpris de voir à quel point ces simples consultations améliorent la satisfaction générale !
Le choix multiple, même limité, renforce considérablement le sentiment d’autonomie. Proposer deux entrées, deux plats principaux et deux desserts permet à chacun d’exercer sa liberté de choix sans complexifier excessivement la logistique. Certains établissements vont plus loin avec des formules « à la carte » pour certains repas de la semaine.
L’implication peut également prendre des formes plus actives : ateliers culinaires où les résidents préparent eux-mêmes certains plats, jardins thérapeutiques fournissant herbes aromatiques et légumes, recueil des recettes familiales intégrées ensuite aux menus… Ces initiatives transforment les résidents de simples consommateurs en acteurs de leur alimentation.
La personnalisation s’étend également aux horaires et aux lieux. Les établissements les plus innovants assouplissent les heures de service, proposent des formules « room service » pour les jours où l’on préfère manger dans sa chambre, ou créent des espaces cuisine accessibles aux résidents et leurs familles pour préparer occasionnellement leurs propres repas.
Innovations et bonnes pratiques en restauration collective pour seniors
L’alimentation seniors en collectivité connaît actuellement une véritable révolution. Des approches novatrices émergent, combinant recherche scientifique, créativité culinaire et technologies adaptées. Ces innovations visent toutes le même objectif : transformer l’expérience alimentaire en EHPAD pour qu’elle réponde aux besoins nutritionnels tout en préservant le plaisir et la dignité.
Le « manger-main » : une solution pour préserver l’autonomie
Vous avez peut-être observé votre parent ou grand-parent éprouver des difficultés croissantes à manipuler les couverts ? Le « finger food » ou « manger-main » apporte une solution élégante à ce défi. Cette approche consiste à proposer des aliments qui peuvent être saisis directement avec les doigts, sans nécessiter l’usage de couverts parfois devenus trop complexes à manipuler.
Bien plus qu’une simple facilitation technique, le manger-main redonne autonomie et dignité aux personnes qui, autrement, devraient être nourries par le personnel. Pour les résidents atteints de troubles cognitifs comme la maladie d’Alzheimer, qui peuvent manifester une agitation pendant les repas ou se lever fréquemment, cette approche permet de s’alimenter à leur rythme, même en mouvement.
L’art du manger-main ne se limite pas à servir des sandwichs ! Les chefs développent des recettes sophistiquées qui transforment des plats traditionnels en versions préhensibles : purée de pommes de terre formée en croquettes, légumes taillés en bâtonnets, viandes présentées en bouchées… Même les desserts et laitages peuvent être adaptés en versions solides faciles à saisir.
Les établissements pionniers proposent désormais des menus complets en manger-main, nutritionnellement équivalents aux repas classiques. Cette option, proposée sans stigmatisation, permet aux résidents concernés de partager le même moment de repas que les autres, dans les mêmes espaces, préservant ainsi la dimension sociale essentielle.
« Le manger-main n’est pas un pis-aller, mais une véritable approche culinaire qui demande créativité et technicité. Nous développons constamment de nouvelles recettes qui respectent les goûts traditionnels tout en étant parfaitement préhensibles. » – Chef Éric Moreau, spécialiste de la cuisine adaptée
Circuits courts et produits frais : vers une alimentation plus qualitative
Vous êtes probablement sensible à la qualité des produits que vous consommez au quotidien. Pourquoi en serait-il autrement pour les personnes âgées en institution ? La tendance aux circuits courts et aux produits frais gagne du terrain dans les EHPAD, avec des bénéfices multiples tant pour les résidents que pour l’économie locale.
Les partenariats avec les producteurs locaux permettent d’accéder à des produits de saison, récoltés à maturité et livrés rapidement. Cette fraîcheur se traduit par des qualités nutritionnelles et gustatives supérieures. Les fruits et légumes cultivés localement contiennent généralement davantage de vitamines et de minéraux que ceux ayant subi de longs transports et stockages.
L’approvisionnement local crée également un lien avec le territoire qui résonne particulièrement chez les résidents. Retrouver dans l’assiette des produits de leur région, parfois même des variétés qu’ils connaissaient dans leur jeunesse, constitue une forme de continuité identitaire précieuse. Certains établissements organisent des rencontres avec les producteurs, renforçant encore cette connexion.
Sur le plan économique, les circuits courts ne sont pas nécessairement plus coûteux. En réduisant les intermédiaires et en travaillant directement avec les producteurs, les établissements peuvent négocier des tarifs adaptés à leurs contraintes budgétaires. La réduction du gaspillage alimentaire, favorisée par la meilleure qualité gustative des produits, compense également une partie du surcoût potentiel.
Les jardins potagers au sein même des EHPAD représentent l’aboutissement de cette démarche. Au-delà de fournir herbes aromatiques et petits légumes ultra-frais, ces espaces deviennent des lieux thérapeutiques où les résidents peuvent renouer avec des gestes familiers de jardinage, stimulant à la fois leurs capacités physiques et cognitives.
Les nouvelles technologies au service du suivi nutritionnel personnalisé
La révolution numérique n’épargne pas le domaine de l’alimentation seniors. Des outils technologiques innovants transforment aujourd’hui le suivi nutritionnel en EHPAD, permettant une personnalisation sans précédent des régimes et une détection précoce des problèmes potentiels.
Les logiciels spécialisés de gestion nutritionnelle permettent désormais d’élaborer des menus équilibrés tout en tenant compte des multiples contraintes : régimes médicaux, textures adaptées, préférences individuelles, allergies et intolérances. Ces outils calculent automatiquement les apports nutritionnels et signalent les éventuels déséquilibres, facilitant les ajustements nécessaires.
Les tablettes en salle à manger révolutionnent la prise de commandes et le suivi des consommations. Le personnel peut enregistrer en temps réel ce que chaque résident a effectivement consommé, et non simplement ce qui lui a été servi. Ces données, analysées sur la durée, permettent d’identifier rapidement les résidents à risque de dénutrition et d’adapter leur prise en charge.
Les objets connectés font également leur apparition : verres qui mesurent la quantité de liquide consommée, balances intégrées aux chaises qui suivent l’évolution du poids sans procédure contraignante, bracelets qui détectent les mouvements liés à l’alimentation… Ces dispositifs, utilisés avec discernement et dans le respect de l’intimité, fournissent des données précieuses pour un suivi personnalisé.
L’intelligence artificielle commence à s’inviter dans ce domaine, avec des systèmes capables d’analyser les habitudes alimentaires individuelles et de proposer des adaptations préventives. Par exemple, certains logiciels peuvent suggérer des modifications de menu en fonction des conditions météorologiques (plus d’hydratation lors des vagues de chaleur) ou des tendances de consommation observées.
Et si on réinventait complètement la restauration en EHPAD ?
Imaginez un EHPAD où les repas seraient attendus avec impatience, où l’on mangerait aussi bien qu’au restaurant, où chaque résident pourrait retrouver les saveurs qui ont jalonné sa vie… Cette vision n’est pas utopique. Des établissements pionniers, en France et ailleurs, réinventent complètement l’approche de l’alimentation seniors en institution, avec des résultats remarquables sur la santé et le bien-être des résidents.
Les modèles inspirants en France et à l’international
Vous seriez surpris de découvrir la diversité des approches innovantes qui émergent dans le domaine de la restauration en EHPAD. En France, le modèle « comme à la maison » gagne du terrain. Des établissements comme la résidence Les Vergers à Lyon ont transformé leur organisation en créant des unités de vie à taille humaine (12-15 résidents) avec leur propre cuisine ouverte où les repas sont préparés sur place, en présence des résidents qui peuvent participer selon leurs capacités.
Aux Pays-Bas, le concept Hogeweyk (village Alzheimer) pousse le concept encore plus loin avec des maisonnées thématiques où l’alimentation reflète différents styles de vie : traditionnel, urbain, culturel, etc. Les résidents sont orientés vers l’environnement qui correspond le mieux à leurs habitudes antérieures, créant ainsi une continuité rassurante dans leur quotidien.
Le modèle scandinave privilégie quant à lui l’autonomie maximale. Dans certains établissements danois, les résidents disposent d’une allocation alimentaire qu’ils peuvent utiliser soit pour les repas collectifs, soit pour cuisiner eux-mêmes dans des espaces adaptés, soit même pour inviter leur famille au restaurant de l’établissement. Cette flexibilité préserve leur pouvoir de décision et maintient les compétences restantes.
Au Japon, l’approche intergénérationnelle transforme l’expérience alimentaire. Des EHPAD intègrent des crèches ou accueillent régulièrement des écoliers pour partager les repas avec les résidents. Ces rencontres créent une dynamique sociale stimulante qui améliore significativement l’appétit et l’humeur des personnes âgées.
Ces modèles partagent un point commun : ils replacent l’alimentation au cœur du projet d’établissement, non comme une simple nécessité logistique, mais comme un vecteur fondamental de bien-être et de dignité. Leurs résultats en termes de satisfaction, de nutrition et même de réduction des troubles du comportement parlent d’eux-mêmes.
Quand les chefs s’invitent en maison de retraite
Avez-vous déjà imaginé un chef étoilé aux fourneaux d’un EHPAD ? Cette idée, qui pouvait sembler farfelue il y a quelques années, devient réalité dans plusieurs établissements. L’intervention de chefs professionnels transforme l’approche culinaire et élève considérablement les standards de la restauration collective pour seniors.
Le programme « Les Toques en EHPAD », lancé dans plusieurs régions françaises, permet à des chefs locaux d’intervenir régulièrement dans les établissements. Ils ne se contentent pas de préparer un repas exceptionnel ; ils forment les équipes, revisitent les recettes du quotidien et transmettent leur passion pour les produits de qualité et les techniques qui préservent les saveurs.
Certains établissements vont plus loin en recrutant directement des chefs issus de la restauration traditionnelle. Ces professionnels apportent leur expertise technique et leur créativité, tout en s’adaptant aux contraintes spécifiques de l’alimentation seniors. Ils développent une cuisine qui concilie exigences nutritionnelles, textures adaptées et excellence gustative.
« Cuisiner en EHPAD représente un défi passionnant. Nous devons respecter des contraintes techniques très précises tout en créant de l’émotion gustative. Quand je vois un résident fermer les yeux de plaisir en dégustant un plat, je ressens la même satisfaction qu’avec les clients de mon restaurant. » – Chef Philippe Renard, consultant culinaire en EHPAD
Les événements gastronomiques ponctuels dynamisent également la vie des établissements : semaines thématiques autour d’une région ou d’un pays, repas de fête élaborés, dégustations commentées… Ces moments d’exception rythment l’année et créent une attente positive autour de l’alimentation.
L’impact de ces interventions dépasse largement le cadre culinaire. Elles valorisent le travail des équipes de restauration, souvent peu reconnues, et transforment le regard porté sur l’alimentation institutionnelle. Les familles elles-mêmes redécouvrent l’importance de la qualité gustative dans le bien-être de leur proche.